Article paru dans RUGBY MAG (n° 1140 de février 2015)
Le plaisir retrouvé
Victime d’un grave accident sur un terrain en 1997, Didier Lagarde, l’ancien talonneur du Boucau, a réussi à se remettre debout six mois plus tard. Récemment, il a découvert la peinture et retrouvé le plaisir.
À 44 ans, Didier Lagarde habite Tarnos, dans les Landes, sa ville de toujours. Il est issu d’une famille où le rugby est une tradition. Un frère de sa mère a longtemps joué à Boucau Stade quand le club évoluait en Groupe A, au plus haut niveau, et un autre oncle a porté le maillot de Sarlat et de Salles. Le sort l’a frappé le 11 mai 1997 alors qu’il jouait talonneur à Boucau-Tannos, le club où il a commencé à l’école de rugby et où il a toujours évolué. « Je venais d’avoir 27 ans. J’avais fait toute la saison en première en Nationale B. Ce jour-là, je navais pas été appelé dans le groupe et, pour dépanner, j’étais allé jouer en 1/8° de finale de réserve, à Artix, contre le Stade Toulousain », explique-t-il. « Sur une touche, j’ai intercepté le ballon, je suis allé percuter et je me suis retrouvé la tête contre le sol. Je n’ai pas eu le temps de me mettre sur le côte et j’ai pris un ou deux gars dessus. Fracture et luxation des cervicales au niveau C4 et C5, ce qui a entraîné une tétraplégie complète. La chance que j’ai eue, c’est que j’ai été assez vite secouru et je suis parti en hélicoptère à Pau ».
Après trois semaines d’hospitalisation à la clinique Larrieu de Pau, Didier Lagarde allait passer seize mois au centre de rééducation Marienia à Cambo-les-Bains. « Après je suis parti un mois au centre Kerpape, à Ploemeur, près de Lorient. J’avais récupéré pendant ma rééducation et j’ai réussi à me remettre debout après six mois. Maintenant, je me déplace avec une canne chez moi et sur des surfaces planes. Mais j’ai un fauteuil manuel car je fatigue assez vite ».
ECHANGER SUR LA VIE DE TOUS LES JOURS
Didier Lagarde n’a jamais coupé les ponts avec le rugby. « Je suis toujours resté en bons termes avec les copains. J’ai été entouré par des joueurs mais c’est surtout mon ex-épouse Valérie qui m’a soutenu dans cette période, ainsi que mon ancienne amie, Isabel ». Toujours passionné, il va voir des matchs à Biarritz et à Bayonne. « Même si je suis plutôt BO, j’aime le rugby avant tout. Mon accident ne m’a pas freiné. Je me dis que c’est un accident bête comme on peut avoir un accident de voiture. Je n’aurais pas dû jouer ce match, mais c’est comme ça ». Il a aussi été invité deux fois pour assister à un match de l’équipe de France dont le dernier en février 2014 contre l’Irlande.
Au fil des années, Didier Lagarde a vu le regard changer sur les grands blessés. « Il y a aussi le fait qu’on ne pousse plus les mêlées dans certaines compétitions et les accidents sont moins fréquents, même si le risque zéro n’existera jamais, car le rugby est un sport de contact et de combat ». Didier Lagarde estime que l’action de la Fondation Ferrasse est importante. « Je fais partie des anciens blessés et quand j’ai besoin d’aide pour l’aménagement de ma voiture ou pour l’ordinateur, la Fondation est toujours présente. Il y a aussi Rugby Espoir Solidarité qui permet de nous voir une fois par an lors de son assemblée générale ». Il insiste sur le développement « des relations entre grands blessés car il est essentiel d’échanger sur les questions de la vie de tous les jours ».
Divorcé et père de deux enfants, Didier Lagarde cultive un autre centre d’intérêt depuis un an, lui qui savait déjà dessiner de par son ancienne profession. « Je suis mis à la peinture. Je fais surtout des paysages, mais je peux faire autre chose. Pour le mariage de mon infirmière qui tournait autour du rock, j’ai peint une toile sur ce thème. Cela m’apaise. Peindre est un véritable plaisir ». Mais le rugby occupe toujours une place dans son coeur, lui qui a baigné dans l’ambiance du Boucau Stade et qui fait encore partie des Old Black, les anciens du club.
Texte : Félix Chiocca – Photo : Loïc Déquier